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21/01/2008
Saumon des Dieux, Lampris guttatus
Il s'agit également d'un met fin qui a Tahiti est accomodé avec une sauce vanille après un tourne retourne en poële beurrée ou huilée. Saler (au gros sel de guerande par exemple) et poivrer avant de jeter sur la poële biensûr.
Ce beau colosse ovale des profondeurs mérite la rencontre.. en surface !
08:00 Publié dans ;-) | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : saumon des dieux, saumon
14/01/2008
Charlie et la chocolaterie, Tim Burton
Willy Wonka est un personnage esthétique. Il défie les perspectives, libère les couleurs et canalise mal son imagination.
Sa froideur relationnelle, il la compense par un goût immodéré pour le chocolat. Vous savez, cette gourmandise royale qui libère des hormones anti-déprime.
Billy est tout l'inverse, ce jeune garçon a la chaleur et solidarité familiale chevillées au corps.
Le chocolat pour Billy, c'est une tablette par an ... pour son anniversaire.
Les perspectives, il les contemple mais sa pauvreté l'en tient à l'écart. Mais ce n'est pas un problème.
La vie n'est pas dans les perspectives et l'argent.
La vie de Willy a la couleur de son usine, grandiose et triste à la fois. Et puis, que deviendra la fabrique géante une fois son propriétaire disparu ?
Willy organise un jeu mondial : un must de marketing relationnel. Cinq "golden tickets" sont dissimulés dans cinq tablettes de chocolat Willy Wonka et dispersées de par la planète.
Les cinq heureux élus pourront visiter cette étrange usine et un élu aura le présent suprême !
S'ensuit un délire artistique sublime entre excentricité colorée et vengences exquises.
Un film à la fois beau, moral, asymétrique, esthétique, déconcertant et tout à la gloire de ce maestro génial qu'est Johnny Depp.
Un rictus, un sourire, une démarche, Johnny inonde l'écran de sa présence gourmande, fascinante, telle une hormone libérée par le chocolat.
Mon appréciation : 9/10. A voir en famille !
08:35 Publié dans A voir | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Charlie et la chocolaterie, Tim Burton, Johnny Depp, Freddie Highmore, David Kelly, Helena Bonham Carter, Noah Taylor
07/01/2008
Dialogue avec mon Jardinier, Jean Becker, Henri Cueco
Si vous devez pleurer à la fin d'un très beau film, il faut le faire, sans retenue, comme sur les accords du blues du siffleur.
Provincial, j'ai connu tout petit la vie des campagnes françaises, ardéchoises et lozériennes en l'occurrence (les patois et expressions typiquement locales, les fruits et légumes de potagers, aux odeurs puissantes, aux goûts intenses, les chiens de garde ou d'accueil, comme vous préférez, petits roquets, blancs et noirs ébouriffés, les champignons, les lapins cuits au sang accompagnés de pommes de terre bouillies, les habits de travail taillés dans les mêmes tissus démodés,..). C'est une belle histoire française, enracinée dans la langue, les traditions, l'amitié, la solidarité, la nature, la vie simple, le temps qui passe avec lenteur et bonheur.
La langue, c'est un français de relief, qui dessine des images dans la tête, avec toutes leurs dimensions, qui fait naître des souvenirs, des odeurs, des sourires. Henri Cueco a su cueillir et restituer cette beauté du patrimoine français, sans raccourcis, sans laque, sans édulcorant ou colorant.
Quand j'entends "Dujardin" - surnom du personnage interprété par Jean-Pierre Darroussin - expliquer à "Dupinceau" - Daniel Auteuil - pourquoi il enlève ses bottes avant d'entrer dans la maison, je comprends le dialogue dans toutes ses dimensions. Appréciez plutôt : "la terre reste incrustée dans les semelles et avec le chaud dans la cuisine, ça laisse des gauffres".
Cueco concentre ici à la perfection tout l'humour du parler vrai de la campagne française, où l'on est heureux de vivre, quelles ques soient les vicissitudes de la vie.
Dupinceau - surnom de l'artiste peintre - fuit la superficialité parisienne, ce que j'appelle parfois la "tendancitude", the "last vibe"..
Il s'installe à la campagne suite à la disparition de ses parents et son début de divorce et décide de faire renaître le jardin de ses parents autrefois si beau. C'est la priorité, et en particulier le potager, qui l'inspire, lui donne les couleurs, les senteurs, la beauté des alignements, la disparité des espèces. Il engage un jardinier pour réaliser ce travail et retrouve un ami de tendre enfance, local pure souche.
La complicité et la convivialité vont renaître comme s'ils s'étaient quittés hier, autour d'un petit coup de Chirouble. Et dans cette vérité, Dupinceau explique qu'il a choisit de suivre ses envies, de se réaliser pour ne pas ré-éditer l'erreur de son père, pharmacien à vie et fidèle aux règles matrimoniales imposées par sa femme : "mon père lui, il n'aurait pas osé dire non. Ses aspirations d'artiste, il se les ai gardées.."
Et Dupinceau poursuit en expliquant à son ami qu'il peint ce qu'il ressent en regardant et non ce qui se voit : "je peins moins ce que je vois que ce que j'imagine". Dujardin après un réflexe de bon sens "c'est quand même étonnant de sortir dehors pour peindre ce qu'on ne voit pas", interprète sur son registre, le vécu : "l'océan, on le voyait sans le voir, mais à l'odeur on le devinait". La maturité de l'artiste parisien est étourdissante, et fait écho aux Rousseau et Chateaubriand en référence au bonheur : "avoir la volonté de bien prendre son temps et de regarder autour de soi".
Mais le bonheur de Dujardin est dans le prévisible, la douce routine, le temps cyclique des bons moments, qui touche doucement à l'ennui : "ça me fait bizarre de faire dimanche au milieu de la semaine". Dupinceau adapte ses activités à son envie : "laisse-toi vivre, merde !".
Dujardin reste dans le registre du vécu : "la peau d'une femme, c'est des choses qu'on voit sans dire qu'on les regarde". Dupinceau conclue brillemment sur le pourquoi et le comment lire une oeuvre d'art : "aucune envie de t'expliquer ; ressentir ! y a des profs pour expliquer !"
Le temps du lendemain, Dujardin le prévoit à coup sûr. Quand Dupinceau lui demande une explication, ce qu'il faut regarder dans le ciel : "tu gardes tes secrets sur le temps ?", la réponse est à propos "tu ne dis pas ce que tu regardes quand tu peins".
La vie joue ici dans les couleurs réelles et les sentiments entiers : Dujardin n'aime pas l'électricien choisi par Dupinceau, mais quelques jours plus tard, on apprend qu'il lui reconnaît de bien travailler. On est loin du fleuret moucheté faux-cul de la capitale, le politiquement correct mortifiant. Ici, on se met parfois "deux, trois poignées d'beigne sur le museau". Et lorsque l'on parle de salade, on entame un sujet à la diversité immense : "il y en a autant de variétés qu'un curé peut en bénir, fils de loup, tu vas pas être déçu".
Et le potager, c'est l'expression de l'amitié, du travail bien fait, de l'art dans la nature, la main de l'homme accompagné du mouvement de la nature. Le cadeau magnifique, c'est un beau légume, élevé avec amour et patience : "demain, je t'apporte un choux-fleur, mais alors, le choux-fleur bichonné, ni poux, ni saloperie !"
L'urbanisme est un poison, "oh la la, vous êtes combien à rouler en même temps ?". Le bonheur n'a pas besoin de tous ces artifices et Dujardin en est sûr : "vivre en ville rend fragile".
Mais le bonheur est l'affaire des mortels et les belles histoires ont une fin. Aussi, vaut-il "mieux mourir d'un coup, on arrive au ciel en meilleure forme" remarque Dujardin.
Il profite donc de ces moments, allongé au milieu des rangs de poivrons et de haricots car jardiner, c'est sa vraie vie. Il est au sommet de sa passion, à l'apogée de son art : "J'ai jamais fait des légumes aussi beaux, on dirait que ça leur plaît de voir leur jardinier couché avec elles".
Messieurs Cueco et Becker, je vous remercie pour ce bonheur d'une heure cinquante. L'un des plus beaux films qu'il m'ai été donné de voir !
Mon appréciation : 10/10 !
08:05 Publié dans A voir | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Dialogue avec mon Jardinier, Jean Becker, Henri Cueco
01/01/2008
Sideways, d'Alexander Payne
En fait, j'aime les histoires d'amour sensibles, qui se découvrent avec finesse, au travers d'une compréhension intuitive commune, des regards, d'une dégustation, d'une complicité qui devient totale et qui ne se sert des mots que par défaut. J'aime la lenteur des bons instants, l'ambiance jazzy et feutrée d'un lobby chaleureux, la lumière intense et déclinante d'une balade en décapotable au milieu des vignes, les dégradés de marron et de vert d'un casse-croûte en campagne.
Je déteste les films lisses et bien pensants, les univers esthétiques parfaits, le goût mondial, la force tranquille des héros intouchables. Je déteste la cuisine industrielle, la sursaturation sucrée ou salée, les vins aux goûts de concentrés arômatiques.
Sideways est une histoire banale, une bulle de vie, mais une tranche de vérité dans un monde hanté par les névroses modernes. La faiblesse de l'autre se trouve souvent à une situation de là, un fait inattendu qui vous fait "péter les plombs" au sens propre des mécanismes électriques du cerveau.
Miles, joué par Paul Giamatti, est un pauvre type, selon toute apparence, du moins le pense-t-il. Prof qui s'ennuie lui-même, écrivain jamais publié, physique lambda, fauché comme les blés.
Jack est son ami, du moins a-t-il ce statut depuis un partage de chambre comme étudiant à la fac avec Miles. Jack, interpreté par Thomas Haden Church, est un acteur de série B raté qui n'émeut par son talent que les serveuses de restaurant nostalgiques.
Miles et Jack ont décidé de s'éclater. Une semaine de bonheur dans ce monde ingrat. Miles aime le pinot noir, Jack est un dévoreur de vie et de femmes insatiable. Ils sont l'eau et le feu, mais leur médiocrité terrestre les rapproche. Et c'est bien ce qui peut aussi les transcender. Trouver dans une dégustation, une balade, une discussion, le fond des sens, la beauté de la vie.
Parfois, c'est tout à la fois. Comme ce passage dans les rangées de pinot noir, ce cépage que Miles dit dur à cultiver, à la peau fine, au beau tempérament, qui mûrit très vite. "Ce n'est pas un survivant comme le Cabernet !". Le pinot noir, poursuit Miles, ne s'acclimate qu'à de petits terroirs bien spécifiques. Seuls les plus patients et les plus soigneux des viticulteurs pourront l'amadouer. Miles est un être exceptionnel, capable de saisir l'essence même de ce beau cépage aux fruits rouges subtils, anciens.
"Le cabernet est plus puissant, plus prosaïque". On en viendrait à le trouver vulgaire ! ;-)
Maya - Virginia Madsen - répond au diapason. Elle aime à penser à la vie du vin. "Il évolue sans cesse". Une bouteille est en constante évolution jusquà son apogée, puis elle entame un lent et inexorable déclin.
Et les deux - Maya et Miles - ont cette beauté rare que la folie exprime : "le jour où on ouvre un Cheval Blanc 1961, c'est l'occasion !" Quel bel hymne à la vie, quel bras d'honneur aux conventions castratrices !
Le goût mondial prend sa part quand Miles explique à Jack son dégoût de la seconde fermentation californienne du Chardonnay.
Miles prend le temps d'initier Jack à la dégustation, l'observation de la densité des couleurs, le flairage, l'oxygénation. Et les personnalités sont brutes et simples. La question de Miles à la fin de la séance de dégustation est mémorable : "tu maches du chewing-gum ?!!"
Le relief n'est pas seulement dans le verre : ce vin "est plus serré qu'un cul de nonne, mais très fruité !"
Les médaillons de porc saupoudrés de truffe noire participent à un enchaînement génial : withcraft winery en pinot noir bien sûr, seasmoke rouge dans le cépage que vous savez, Pommard et enfin Richebourg.
J'apprécie Miles car il joue au golf aussi bien que moi, il sait commander un "croissant aux épinards", attaquer avec Jack des joueurs gougeats trop pressés en moulinant leurs clubs au-dessus de leur tête et en poussant des cris terrifiants tels des hommes des cavernes distingués du 21ème siècle mais aussi déguster un beau verre de vin au pied d'un grand arbre sous un coucher du soleil aux tons dorés pastel.
08:15 Publié dans A voir | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : sideway, Alexander Payne, wine, pinot noir, vin, art de vivre