27/08/2010
Secret de Léoube rosé et Les Forts de Léoube rouge
La route de Léoube longe le littoral aux pieds de la forêt domaniale des Maures partant de « Les Bormettes » non loin de La Londe-les-Maures jusquà Brégançon. Nous sommes au cœur du paradis ici entre mer et forêt exceptionnelles !
Il m’a été donné de déguster deux crus du Château Léoube en côtes de Provence : le Secret de Léoube 2009 en rosé et Les Forts de Léoube 2006 en rouge.
Le Secret de Léoube 2009, rosé, est élaboré avec de vieilles vignes – 30 ans – en assemblage grenache (40%), cinsault (40%) et autres cépages, probablement tibouren pour le ton de fraîcheur de ce vin. Le sous-sol est schisteux et argileux et le climat profite d’un soleil intense le jour et de nuits fraîches en proximité de la mer. Romain Ott, l’actuel directeur du domain s’assure d’un travail complet du sol, rang et inter-rang et ce sans désherbant. La vendange est manuelle, réalisée au château pour une alimentation directe du chai où a lieu la presse. Le vin ne quittera plus le château avant la commercialisation et veillera sur ses crus au sein de ses caves souterraines aménagées au XVIII ème siècle.
Le Secret de Léoube est habillé d’une bouteille élancée, élégante, son nom écrit autour, à la main, en blanc surimprimé. Le Secret donne à son écrin une couleur acidulée, d’un doux rose que la lumière fait briller. L’embouteillage se fait encore au liège et ce choix est le bon pour un rosé à boire.
Au nez Le Secret commence à se livrer et il faut flairer délicatement pour ne pas se laisser saturer par les vapeurs alcooliques. Les douces notes florales s’imposent sur une majeure de rose et un support de fleurs blanches. L’assemblage grenache et cinsault laisse en post dégustation de beaux arômes résiduels de framboise apportés par les fermentations alcoolique et malolactique.
La bouche est harmonieuse mais je vous conseille de l’ouvrir une heure ou deux avant de déjeuner et si possible de la carafer pour l’oxyder un minimum et atténuer une peu son attaque alcoolique (13° tout de même). Les tons floraux se confirment et le pamplemouse rose éclate au palais avec un retour acidulé. Le Secret devient friandise, bonbon pour adultes.
Les Forts de Léoube 2006, rouge, est également assemblé sur cépages de vignes de 30 ans de syrah pour 35 %, le merveilleux mourvèdre pour 30%, le grenache pour 20 % et enfin le Cinsault à hauteur de 15 %. Comme pour Secret de Léoube, ce vin est issu d’une vendange complètement manuelle. Les Forts de Léoube à la robe rouge sombre présente un beau nez de fruits noirs sur une dominante de cassis et de mûres et une fin de bouche sur les épices. Il est impératif de carafer et d’oxygéner abondamment bien en avance de la dégustation ou du déjeuner. Ce millésime appelle quelques années de garde supplémentaires pour dompter son tempérament. Les fondamentaux sont bons et la dégustation prend de l’ampleur après quelques demi-journées d’ouverture de la bouteille.
En synthèse, je dirais que ce château a un réel potentiel qu’il se donne les moyens de ses ambitions. Sir Anthony Bamford, le propriétaire, a choisi les Ott père et fils - Jean-Jacques et Romain – pas moins, pour faire grandir ses vins.
Ma préférence naturelle va au Forts de Léoube et je mise sur la qualité de cet assemblage comme tête de proue du domaine dans les années qui viennent.
Contact :
Château Léoube
2387, route de Léoube,
83230 Bormes-Les-Mimosas,
Tel. 04 94 64 80 03, Fax 04 94 71 75 40,
email : info@chateauleoube.com
21:30 Publié dans Les Provence | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : léoubé, cotes de provence, chateau leoube, maures, secret de léoube, les forts de léoube
20/08/2010
Chez Mamelou, Dolus d'Oléron : églades et mouclades en famille
En région parisienne, ce nom annoncerait proablement un concept « branchouille » ou faussement campagnard. A Dolus d’Oléron, entre Saint-Pierre et le Château d’Oléron, cette adresse familiale est un des bons coins de l’île. Mamelou vous accueille et vous place avec un sourire simple et sincère. Le fils prend les commandes habillé d’un t-shirt « chez Mamelou », une huître dessinée en guise d’écusson. Son père flambe les églades devant les convives amusés.
Un chapelet de cabanes d’ostréiculteurs, dont la plupart ont malheureusement été abandonnées ou reprises par des artistes et autres magasins bobos, est posé le long des chenaux vaseux et salés, corsetés de boucaux et pieux de repère. Les bateaux à fond plat et matériels ostréicoles gisent et s’animent au grès des marées. Entre terre et mer, calme plat et forte activité, le lieu est atypique et laisse l'esprit vagabonder. Mais un point est commun à tout cet environnement : la simplicité naturelle.
Et le succès est assuré : on mange « à la maison », des plats de fruits de mer que l’on ne fait précisément pas à la maison. Les formules sont fraîches, sans chichi et les quantités importantes autant que les prix raisonnables. J’ai noté le dessert de tartes maison au beurre salé à 2,5 euros, eh oui ! Sur l'autre île, de France celle là, les desserts ont tendance à devenir l'arnaque de la carte à souvent plus de 7 et 8 euros..
Mais pour revenir aux plats principaux, ils sont typiques, goûteux et radicalement simples.
Les églades, par exemple, sont une spécialité oléronaise de moules alignées en rangs ou en cercles concentriques, sur la tranche, posées sur une plaque de lauze ou une épaisse planche de bois.
Ces beaux arrangements de moules sont placés sur une table de fer, recouverts d’aiguilles de pins auxquelles on met le feu. En quelques secondes les moules sont cuites sous le brasier et acquièrent une saveur unique de fumée et de pin.
Pour ceux que les églades n’attirent pas, la moule est également proposée en mouclade (préparation cuisinée avec vin blanc, curry, beurre, jaune d'œuf, persil et bouquet garni). Les huîtres sont de bonne qualité et les palourdes marinières d’une tendresse formidable.
Je vous conseille la bière blanche locale « des naufrageurs », encore en fermentation si l’amertume du brassage à l’ancienne ne vous rebute pas.
Globalement un excellent rapport qualité / prix / ambiance. Il vaut mieux réserver et prévoir de prendre le temps de vivre et de s’évader..
Contact :
Route des Huîtres Chenal de la Baudissière
17550 Dolus d'OléronFrance
Tél : 05 46 75 44 41
20:18 Publié dans Restaurants, Vos restaurants favoris ?, Ze bières du monde | Lien permanent | Commentaires (5)
15/08/2010
Huîtres de Fort-Royer, Ile d'Oléron, site Ostréicole et Naturel : dégustation exceptionnelle
Pas de résidences secondaires ici, ni de cabanes d’artiste, encore moins de restaurants. Si vous venez pour le spectacle, ce sera celui de la nature, entre bancs de sable et de vase, marées, vent et soleil. Fort-Royer est un véritable site ostréicole, sans faux-semblant, et une réserve naturelle qui s’étend de Boyardville au Château d’Oleron. La réserve présente notamment d’immenses bancs de sables, reposoirs et garde-manger précieux pour les oiseaux notamment au cours de leur migration. Les spécialistes ont répertorié sur Fort-Royer 285 espèces d’oiseaux différentes. La terre avance ici sur la mer. Le banc de sable a cent ans. Une dune se forme à l’abri de laquelle une vasière s’étend.
De jeunes actifs passionnés ont fondé l’Association du site ostréicole et naturel de Fort-Royer.
Leur objectif : reconstruire le village de baraques à l’identique, et lui garder son cachet ostréicole.
Ce travail a une grande valeur car Oléron est historiquement clef en France dans l’élevage de l’huître. En effet, l'huître plate, du nom de « Ostrea edulis », dite « Marennes» a fait la renommée du bassin pendant plusieurs siècles, et était même la seule espèce d'huître cultivée en France jusqu'au milieu du XIXème siècle.
Mais l’histoire de l’huître commence par sa pêche à pied, il y a des millénaires. Les Grecs les mangeaient confites et gardaient leurs coquilles pour voter avec. Les Romains, très grands consommateurs, ont eu besoin de les élever en masse. Ils utilisaient pour cela des fagots. Des cures de remise en forme à base d’huîtres étaient organisées, et les dégustations prenaient toutes les formes : crues, marinées, salées, farcies, cuisinées.
En France, l’huître était un mêt réservé aux rois qui en engloutissaient jusqu’à douze douzaines en une soirée !
Et de ces premiers temps de culture, le travail est resté encore très artisanal, peu mécanisé. Avant d’arriver dans l’assiette, l’huître est manipulée en moyenne une vingtaine de fois !
L’huître plate a donc fait la réputation du bassin de Marennes et se retrouve en Bretagne : la « Belon » et également en méditerranée : la « Bouzigue ». Mais la maladie de 1920 a décimé l’huître plate. Les creuses au goût très différent – portugaises, originaire d’Amérique du sud, ou «Crassostrea angulata » – sont de très grande qualité. Elles ont marqué les 50 ans d’âge d’or de l’huître. Choisies à la place des plates, leur prolifération a saturé le bassin et enclenché à partir de 1968 leur dégénérescence faute de nourriture. A partir de 71, avec l’aide de l’Etat, les éleveurs ont basculé sur une huître japonaise creuse « Crassostrea gigas » pour atteindre jusqu’à 65000 tonnes de production sur le bassin de Marennes d’Oléron. En 1978, pour comparaison la quantité de mollusques plats encore commercialisés n’était que de 50 tonnes. Comme le relate un rapport de l’Ifremer, « les ostréiculteurs marennais qui ensemençaient leurs claires au printemps avec des huîtres plates âgées de 2 a 3 ans provenant de Bretagne éprouvent des difficultés d'approvisionnement, du fait de l'épizootie due à Martelia refringens qui sévit chez Ostrea edulis dans de nombreux centres ostréicoles bretons ».
Après les déclins de la plate et de la creuse portuguaise, nous connaissons probablement le troisième déclin majeur, celui de la creuse japonaise « gigas ». Un virus se développe et tue aujourd’hui les huîtres juvéniles de 1 an et occasionne la perte des trois quarts du parc. L’Ifremer étudie le virus qui profite semble-t-il d’une fragilité génétique (pas de système immunitaire) de l’huître.
Autour de la planète, 300 espèces ont été recensées dont encore une centaine en vie. Des pistes semblent s’ouvrir sur une variété du Brésil, mais les tests ne sont pas terminés.
Les jeunes ostréiculteurs de Fort-Royer (ils sont cinq actuellement) ont décidé de relancer le travail – de la creuse japonaise « Crassosterea gigas » pour l’instant - de la forme, de la taille et du goût. Il faut avoir en tête que seules 1192 cabanes sont encore en activité sur les 2500 que comptait le bassin il y a vingt ans.
L’élevage se fait au cœur du parc, l’affinage en claires et l’expédition dans des établissements contrôlés. La Marenne d’Oléron à 4 ans à maturité contre 3 ans voir moins ailleurs. La taille la plus recherchée est la moyenne et le challenge consiste à l’obtenir pour le rush de commercialisation entre décembre et janvier. Si elles sont trop petites, les pauchons qui contiennnent les huîtres sont dédoublées et on s’assure qu’elles soient toujours dans l’eau pour se nourrir en continu. Si elles sont en avance de croissance, on double le nombre d’huîtres par pauchon et on les rapproche de la terre pour qu’elle soient moins souvent dans l’eau.
A l’état naturel, les huîtres s’allongent car collées les unes aux autres, elles disposent de peu de place. Entrechoquées dans les pauchons – on détruit la dentelle de croissance de la coquille – elles s’arrondissent et prennent une forme propice au développement de la chair.
L’huître est un mollusque fascinant. Songez qu’en une heure de temps elle filtre environ 7 litres d’eau de mer. Elle change de sexe chaque année et sa laitance d’été est constituée par les cellules reproductrices mâle ou femmelle. Dès que l’eau passe les 18°C, les huîtres libèrent leur laitance. Les petites huîtres naissent une fois attachée à un support quelconque (pierre, métal, plastique) et crée leur première coquille en 36 heures. Au bout d’une semaine, elle a la taille d’un grain, au bout d’un mois celle d’une pièce de 1 euro. Elles peuvent vivre jusqu’à 20 ans ! On les appelle alors les « galoches » pour les huîtres plates, et les anciens ont l’habitude de les cuire dans la cendre de la cheminée.
Certains élevages achètent des petites huîtres nées en écloserie qu’on fait s’attacher sur de la micro-brisure (une micro-support pour une seule larve d’huître). Les huîtres nées en écloserie sont reconnaissables à leur « bec » (tête de canard) en pointe d’huître. Elles représentaient il y a peu 50% des huîtres élevées mais le virus qui frappe actuellement l’huître « japonaise » attaquant spécifiquement les juvéniles, le recours aux écloseries est freiné.
Et comme un virus ne suffit pas, les prédateurs traditionnels de l’huître sont également nombreux : l’étoile de mer qui se fixe sur la coquille, fatigue l’huître et insère son estomac dans la coquille pour la dévorer. Les bouchots – pieux d’élevage de moules – ont été décimés cette année par les étoiles de mer (à raison de 60 centimètres par bouchot soit 15 kilos de moules). Les raies quant à elles écrasent dans leur mâchoire les huîtres pour les manger. Les dorades aux dents assérées s’en régalent également et les crabes les attaquent à la pointe du bec pour couper leur muscle.
Enfin, le plus redoutable est le murex ou « bigorneau perceur » (coquillage en forme d’escagot pointu) originaire d’Asie. Il se pose sur un coquillage comme l’huître et perfore en 30 heures la coquille – trou d’une taille d’une tête d’épingle - avant d’injecter un liquide astrique et d’aspirer l’huître.
Mais revenons à l’élevage et surtout à l’affinage qui est la marque de fabrique des Marennes-Oléron. Le bassin de Marennes-Oléron compte 2500 hectares de parc et 3500 hectares de claires dans lesquelles on cultive le plancton. La mer monte, le chenal se remplit, les claires à leur tour, puis la mer se retire et l’eau baisse jusqu’au niveau du tuyau qui règle le niveau de la claire. La navicule (en forme de navette) se multiplie dans les claires puis quand elles saturent la claire, elles dégénèrent simultanément en libérant un pigment bleu : le bassin devient bleu marine, noir. Les huîtres filtrent ce pigment bleu et verdissent. Cette phase marque l’affinage, le travail en bassin mais ne change rien à la qualité.
Les huîtres sont disposées à raison de 20 par mètre carré pendant un mois minimum : on obtient ainsi les fines de claires. A dix par mètre carré pendant 2 à 3 mois, on peaufine les spéciales de claires, les plus chères. Il est vrai que l’on peut trouver des fines ou spéciales de mer car élevées dans des zones où il y plus de plancton (une rivière ou un courant par exemple) et où les huîtres y deviennent donc plus charnues.
Les claires sont entretenues - recreusées - par tiers pour ne plus y retoucher pendant 5 ans (la première année qui suit l’entretien correspond à une jachère). La vase est pleine de petits mollusques, crustacés tués par 3 semaines de plein soleil et qui vont enrichir en matière organique et sels minéraux la claire. Cela assurera l’explosion du plancton et particulièrement de la navicule. L’été, trop chaud, n’est bien sûr pas propice à l’affinage.
Claires dites « gralées » : le sol est craquelé
Les huîtres et leurs terroirs déchaînent la poésie gastronomique. Certains parlent de goût de « terre marine », de « merroir », de noisette. Il est vrai que les huîtres affinées en claires et élevées en pleine mer ont des goûts radicalement différents.
Je vous conseille tout particulièrement la dégustation des spéciales de Fort-Royer, non triploïdes donc non stériles, de préférence en pleine saison, c'est-à-dire entre octobre et mars.
Contact :
Association du site ostréicole et naturel de Fort-Royer
B.P. 43
17310 Saint-Pierre d'Oléron
Tél/Rep/Fax : 0546470648
13:25 Publié dans A voir, Vos visites favorites | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : île d'oléron, oléron, huîtres, spéciales de claires, fines de claires, fort-royer, marennes